Alors que les économies d’’énergie et la performance thermique des bâtiments sont devenues des priorités absolues du Grenelle, le confort acoustique, même s’il passe au second plan, fait également partie des objectifs environnementaux. On peut alors se demander si les techniques mises en œoeuvre pour isoler l’’enveloppe thermiquement n’auraient pas d’’impacts négatifs sur le confort acoustique. En d’’autres termes, thermique et acoustique ne seraient-elles pas de vraies fausses amies ? Deux experts en la matière se sont penchés sur le sujet. Jean-Baptiste Chéné, chef de la Division Essais Acoustiques au CSTB, et Jean-Pascal Agard, responsable du bureau d’études Atmosphères, ont analysé ces impacts en fonction de chaque type d’isolation : par l’’intérieur, par l’’extérieur, isolation répartie. Ils ont livré leurs conclusions lors du colloque organisé à Toulouse en décembre dernier par le Centre d’’information et de documentation sur le bruit (CIDB) et le Groupement de l’’ingénierie acoustique (GIAC). Regards croisés entre un acousticien et un thermicien. Isolation par l’’intérieur En rénovation, l’’ITI est souvent la seule possibilité d’’améliorer le confort thermique si l’’aspect extérieur de la façade ne peut être modifié. Facile à mettre en oeœuvre, couramment utilisée donc bien maîtrisée, la solution présente cependant une difficulté à traiter les ponts thermiques et une absence d’’inertie dans les murs, dommageable pour le confort d’’été. En termes d’’acoustique, l’’usage d’’un doublage thermique en mousse rigide (PSE, XPS, PU…) aura un impact négatif, autant sur l’’isolement de la façade que sur l’’isolement intérieur, et cela dans le neuf comme en rénovation. Il faudra préférer un doublage thermo-acoustique, à base de laine minérale ou de PSE élastifié : il n’’aura pas de conséquence sur l’isolement acoustique de la façade et rendra négligeables les transmissions de bruit latérales, d’où un bon confort acoustique intérieur. Isolation par l’’extérieur L’’ITE a l’’avantage de traiter la plupart des ponts thermiques, notamment aux jonctions d’’angle, d’’apporter une bonne inertie thermique au mur et d’éviter, dans le cas d’’une rénovation, une intervention à l’’intérieur du bâtiment. « Même si l’’on dispose de peu de données en France sur l’’évaluation de ces produits en termes d’’acoustique, on peut supposer que l’’ITE se comporte différemment de l’’ITI », explique Jean-Baptiste Chéné. Isoler par l’’extérieur, notamment en utilisant des produits à base de mousse rigide, peut dégrader l’’affaiblissement acoustique. Et si l’’ITE n’’a pas d’’impact négatif sur les transmissions latérales (entre logements), elle ne les améliore pas non plus. Du coup, l’’usage complémentaire d’un ITI thermo-acoustique peut être nécessaire pour atteindre des isolements de 53 ou 58dB. ITI + ITE Cette solution est intéressante surtout en rénovation où elle permet de traiter correctement les ponts thermiques. En revanche, elle présente l’’inconvénient d’’ajouter une barrière thermique en plus à l’’intérieur du mur, ce qui réduit son inertie. Au niveau acoustique, la mixité ITI/ITE n’’a guère été évaluée, mais, comme pour l’’ITI seule, on peut supposer que l’’impact soit négatif si l’’on utilise des produits aux fonctions uniquement thermiques. Le bon compromis est, là encore, de recourir à des isolants intérieurs thermo-acoustiques. « Attention aussi à l’’isolement de façade, précise l’’acousticien. Il peut être dégradé du fait de la présence d’’une triple paroi, notamment sur les basses fréquences. » Isolation répartie Réservée aux constructions neuves, l’’ITR convient surtout à la maison individuelle et au petit collectif où elle permet de traiter les ponts thermiques par planelles. Produit « tout en un », l’’isolation répartie nécessite savoir-faire et précision dans la mise en oeœuvre. En termes d’’acoustique, elle affiche un indice d’’affaiblissement limité (entre 38 et 45dB), suffisant en logement individuel, mais qui, dans le collectif, ne permet pas de corriger les transmissions latérales. On peut alors encastrer les refends et les planchers, mais ces opérations réclament beaucoup de soin dans la mise en œoeuvre. Le mieux est de recourir à un traitement complémentaire, en ajoutant, cette fois-ci encore, une ITI thermo-acoustique. Façade légère Les constructions à structure bois présentent bien des atouts : une grande liberté architecturale, une mise en oeœuvre facile et rapide relevant de la filière sèche, un gain de surface du fait de la finesse de l’’enveloppe… Si le bois a des avantages aussi sur le plan thermique, il est cependant difficile de corriger les ponts thermiques structurels, notamment en simple ossature, et l’’inertie des murs est plutôt absente, d’’où la nécessité de recourir à des isolants denses comme la laine de bois ou la ouate de cellulose. À noter que le choix de la double ossature permettra un meilleur traitement des ponts thermiques structurels par la présence d’’un lattage. Simple ou double ossature, on dispose de peu de recul sur l’impact acoustique de ce mode constructif. Deux principes sont cependant à retenir : l’’utilisation d’’isolants à cellules fermées de type mousse aura un effet négatif sur le comportement acoustique de la façade ; il faut donc privilégier les isolants poreux. Second principe : ces isolants poreux sont à associer plutôt à une double ossature, si possible indépendante, ce qui permettra la meilleure performance acoustique à la fois pour l’’isolement de façade et pour l’’isolement latéral. Trouver le bon compromis entre les objectifs thermiques et acoustiques n’’est donc pas chose aisée. La réponse réside souvent dans la combinaison des atouts de chaque système d’’isolation. L’’obligation de performance énergétique constitue aujourd’’hui une bonne occasion pour faire émerger des solutions cohérentes, s’’inscrivant dans une approche globale multicritère. L’’acoustique du bâtiment sans formules ! Le Centre d’’information et de documentation sur le bruit (CIDB) vient de mettre en ligne sur son site Internet www.bruit.fr une série de « fiches métiers », rédigées par Mathias Meisser pour le compte du ministère de l’’Écologie, destinées aux professionnels de la mise en œoeuvre des constructions. La plupart des corps de métier intervenant dans la construction d’’un bâtiment y trouveront, sous une forme à la fois simple et concise, l’’essentiel des notions à connaître pour résoudre des problématiques acoustiques courantes ou, à tout le moins, ne pas mettre en péril la performance acoustique finale d’’un ouvrage. Pour télécharger les fiches : www.bruit.fr Acoustique et qualité de l’’air La mise en place d’’une ventilation double flux avec récupération de chaleur peut-elle avoir une incidence sur le confort acoustique ? À priori, non, à condition de respecter plusieurs critères dans la conception des caissons, des réseaux et des diffuseurs. On peut, par exemple, ajouter des pièges à sons si besoin. La VMC double flux présente par ailleurs l’’avantage de supprimer les entrées d’’air en façade, sources de bruit. En revanche, la présence de bouches d’’insufflation dans les chambres peut occasionner une gêne, la nuit, même si leur niveau acoustique est faible. Un soin rigoureux dans les réglages et un entretien régulier de la VMC sont les conditions pour éviter cette gêne.