Brillant, mat, brut ou coloré, aspect miroir ou tôle ondulée, prestige ou aspect industriel, le métal en façade permet toutes les audaces… Offrant un aspect moderne et original aux bâtiments, les métaux sont pourtant peu ou mal employés en façade. Cette absence est surtout remarquée dans les bâtiments résidentiels, sans doute parce qu’ils restent, dans l’inconscient collectif, trop associés aux bâtiments industriels et tertiaires. Aujourd’hui, le développement de l’isolation thermique par l’extérieur ouvre un nouveau marché pour l’ensemble des bardages, celui de la rénovation. « Si nous sommes aujourd’hui plus sur le marché du neuf que de la rénovation, avec la RT 2010 qui se prépare, les chiffres ne seront plus les mêmes demain », annonce ­Fabien ­Moulin, responsable marketing et communication chez Umicore. Des centaines de milliers de mètres carrés de façades Qui dit rénovation ne dit pas forcément vieilles pierres et le parc immobilier collectif, construit après guerre, représente une cible de choix. Ainsi, le parc HLM, qui représente 4,2 millions de logements et loge près de 10 millions de personnes, a été souvent qualifié de passoire thermique. Un plan est déjà en place, prévoyant la rénovation thermique de 800000 logements HLM d’ici 2020 parmi les plus énergivores. Le 15 septembre dernier, le ministre de l’Écologie, Jean-­Louis ­Borloo, a encore mis un coup d’accélérateur en annonçant, lors du 70e congrès de l’Union sociale pour l’habitat, l’ajout dans ce plan de 1,5 million de logements supplémentaires classés dans la catégorie D. Une bonne nouvelle pour les entreprises du bâtiment en général et encore plus pour tout ce qui touche de près ou de loin à l’isolation thermique par l’extérieur. Pour ces habitations souvent peu ou mal isolées, l’ITE apparaît en effet comme la solution idéale (pas d’empiétement sur l’espace intérieur, limitation des ponts thermiques et pas besoin de reloger les habitants durant la durée des travaux). Et ces millions de mètres carrés de façades à rénover offrent un immense terrain de jeu et de créativité aux architectes. Rectifier les erreurs passées : tel est l’objectif aujourd’hui, et l’architecture sociale perd de sa spécificité, s’autorisant en façade l’emploi de toute la panoplie des revêtements disponibles, du plus au moins luxueux, recherchant finalement la beauté et l’originalité là où l’on ne trouvait qu’ennui et monotonie. L’architecture sociale mal dans sa peau Dans ce contexte, les industriels du bardage métallique affirment leur ambition de faire du métal un élément de notre environnement urbain et plus seulement pour les bâtiments industriels ou quelques rares projets d’architectes. Cuivre, zinc, inox, aluminium ou acier, tous ont leurs atouts, mais quelques caractéristiques générales ressortent. Souple et malléable, le bardage métallique épouse toutes les formes courbes ou rectilignes. Sa diversité de couleurs, de textures et d’aspects ainsi que sa capacité à s’allier à d’autres matériaux plus traditionnels facilitent son intégration dans le paysage urbain. Il présente également des points forts au niveau environnemental, puisqu’il bénéficie d’un temps de pose réduit en construction sèche, qu’il est démontable, recyclable, durable, mais aussi bien plus économique qu’on ne le pense. Cependant, chaque métal dispose de ses caractéristiques propres. Le cuivre : un naturel changeant « Aujourd’hui, le bardage cuivre se destine principalement aux bâtiments publics (santé, scolaire, culturels, sportifs…), mais, s’il est souvent associé aux architectures prestigieuses, il est aussi prescrit pour des bâtiments sociaux », nous informe ­Rémy ­Perrichon, chef du service toiture et bardage pour KME France. Le matériau séduit par son aspect vivant. Seul métal usuel coloré, sa couleur naturelle brun rouge brillant varie au fil du temps passant par une large gamme de tons pour atteindre une patine vert amande. Les producteurs de cuivre proposent d’ailleurs d’anticiper l’ouvrage du temps avec toute une gamme de nuances prépatinées dès le stade de la fabrication. Résistant grâce à cette patine naturelle, il dispose d’une longévité exceptionnelle (environ cent ans). Il permet en outre une grande liberté créatrice avec des surfaces lisses, en relief ou tronquées, des mises en œuvre en écaille, en cassette ou en panneau. D’apparence luxueuse, il est pourtant beaucoup moins onéreux qu’il n’y paraît. « En pose traditionnelle, cela représente environ 150€ le mètre carré fourni posé, ce qui est finalement meilleur marché que d’autres matériaux plus couramment utilisés. » Acier : atout prix « L’un des atouts principaux, c’est son prix, mais aussi la rapidité et la facilité de mise en œuvre ainsi que le confort de pose », explique ­David ­Piantino chargé de la prescription chez ­Corus Bâtiment et Systèmes. Prélaqué, émaillé, revêtu de dépôts métalliques (zinc, aluminium, alliages…), l’acier est bien plus varié qu’il n’y paraît, mais aussi moins fragile puisque sa longévité peut atteindre quarante ans. Ses nombreuses teintes et textures autorisent une application sur tous types de bâtiments. « Esthétiquement, cela permet des effets originaux, des associations avec d’autres matériaux comme le verre ou le bois ou le mélange de teintes », déclare ­Pascal ­Magain, directeur commercial ­d’Arval. La filiale ­d’Arcelor ­Mittal va d’ailleurs plus loin dans cette idée d’intégration avec son procédé ­Imagéo qui permet de retranscrire une image numérique sur une façade. « Avec ce procédé, on vise évidemment les besoins de signalétique de certains bâtiments, mais aussi le marché de la rénovation avec de grandes possibilités d’intégration dans le paysage. » Zinc : en parfaite harmonie D’aspect métallique brillant, le zinc naturel prend sa patine (gris clair semi-­mat) entre six mois et deux ans selon le milieu environnant et sa localisation sur le bâtiment. Comme pour le cuivre, les industriels ont développé des gammes prépatinées allant des gris clairs mats aux gris anthracite. On trouve également des zincs laqués pour allier la couleur à la malléabilité du matériau. « Il faut savoir adapter le type de bardage au bâtiment existant », prévient ­Fabien ­Moulin, responsable marketing et communication ­Umicore France. L’entreprise a ainsi développé des produits destinés à la rénovation : les Pigmentos. Ce zinc prépatiné propose des nuances de couleurs (bleu, vert, rouge…) pour faciliter son intégration à son environnement. Utilisé sur la façade à partir des années 80, le zinc se fait de plus en plus visible et l’on en trouve désormais pour habiller tant les maisons individuelles que les bureaux ou logements collectifs et sociaux. « Aujourd’hui, on met du zinc parce que c’est beau, durable, avec une esthétique qui n’est pas marquée HLM. » Inox : éclats d’argent Il existe plus de cent sortes d’aciers inoxydables. Mis au point en 1912, c’est un matériau qui allie solidité, facilité de mise en œuvre et résistance à la corrosion. Le choix de la nuance s’effectue en fonction du projet, car il existe une multitude de qualités d’inox. Les uns sont capables de résister à la corrosion en milieu agressif, les autres à des températures extrêmes ou à l’absorption des chocs. Poli, gravé, « microbillé », gaufré ou électropoli, la multitude de ces aspects de surface et de ses alliages fait de l’acier inoxydable le matériau idéal pour des effets résolument métalliques. Aluminium : inaltérable Plus connu pour son usage en menuiserie, l’aluminium s’emploie également en mur manteau. Grâce aux techniques de l’anodisation et du thermolaquage, il peut se parer de toutes les couleurs, brillantes ou mates et de toutes les finitions, lisses, texturées, grainées, martelées, métallisées. « L’aluminium offre une nouvelle vie aux bâtiments rénovés, précise ­Nadège ­Cornu, responsable de la communication pour ­Kalzip, c’est une véritable plus-­value et il permet une grande liberté architecturale. » L’entreprise propose en effet de nombreux systèmes de façade (trapézoïdaux, sinusoïdaux, des systèmes à joint debout…). L’aluminium va même jusqu’à imiter d’autres matériaux comme ­l’Alucobond ­d’Alcan Composites. Ce panneau composite plan, constitué de deux tôles d’aluminium, offre une vaste palette de couleurs, allant de l’uni aux couleurs métalliques en passant par des façades irisées et des finitions imitant l’aspect bois. Malgré leurs espoirs, leurs atouts et la conjoncture favorable, l’avenir des façades métalliques est loin d’être tracé. Les exemples restent sporadiques et, particulièrement en France, on reste très attaché aux matériaux traditionnels (brique, enduit…). Reste à s’ôter le poids des habitudes, à entrer dans un processus créatif et à adopter finalement le réflexe métal. Aurélie Cheyssial