Intervenants :
Philippe Besseau, animateur ressource et bois-énergie – Atlanbois
– Cécile Goube – Directrice « Plantons pour l’avenir »
– Pierre Dumont-Saint-Priest – Cofondateur EcoTree
– Emmanuel Naudin – Délégué « Merci le Peuplier » – Comité national du peuplier

Philippe Besseau : « Mon rôle sur la ressource est de fédérer les acteurs (sylviculteurs, gestionnaires, exploitants…). Il faut renouveler la ressource parce que les arbres poussent lentement. Aujourd’hui, il y a un déficit de renouvellement qui engendrera un déficit du bois demain. Selon moi, nous devrions renouveler six fois plus que ce qui se fait. Ce déficit peut s’expliquer par « la peur de demain » au niveau de la rentabilité, les catastrophes météorologiques, les retards de plantation. On se trouve dans une impasse sylvicole. Les propriétaires s’éloignent parfois un peu de leurs forêts. C’est valable pour toutes les essences. Les raisons ne sont pas forcément les mêmes pour toutes les essences. » 

Cécile Goube : «  »Plantons pour l’avenir » est un fonds de dotation dont l’objectif est de lever des fonds sous forme de dons. C’est une structure d’intérêt général qui permet la défiscalisation dans le cadre du régime du mécénat. Nous lançons des appels à projets auprès des propriétaires forestiers en France pour leur fournir des aides sous forme d’avances remboursables afin de les inciter à reboiser. Dans les années 1990, il se plantait environ 130 millions d’unités en France. Aujourd’hui, on arrive à peine à 80 millions de plants. L’Allemagne en plante 300 millions, la Pologne 1 milliard par an. Un certain nombre de propriétaires sont entrés dans la gestion durable. Il y a des forêts qui se renouvellent seules, mais de nombreuses forêts ont été abandonnées, démultipliées par héritage, parcelles touchées par les tempêtes et le changement climatique. Le peuplement sur pied n’a peu ou presque plus de valeur économique. Comment expliquer aux propriétaires forestiers qu’il faut couper, alors que ça va presque rien lui rapporter et qu’il faut qu’il investisse énormément les cinq premières années pour qu’il ait, peut-être, une première récolte dans 10 à 12 ans. Il y a une sensibilisation sans laquelle on ne peut pas demander à un propriétaire privé d’investir tout seul. Nous nous adressons à des entreprises qui peuvent faire des dons à un fonds de dotation. Nous finançons des travaux préparatoires. « Plantons pour l’avenir » peut venir en complément d’aides publiques avec une avance de trésorier. » 

Pierre Dumont-Saint-Priest : « EcoTree est né d’un constat simple : la conscience écologique n’était pas forcément récompensée en France. L’idée était de réconcilier le développement durable et la rentabilité financière en proposant aux particuliers et aux entreprises de devenir propriétaires d’arbres dont ils financent la plantation et la gestion. Si l’on ne renouvelle pas assez, c’est parce que les propriétaires ne sont pas conscients de la réelle valeur économique qu’a le bois si, après la plantation, il est bien géré. L’innovation d’EcoTree est avant tout juridique car elle permet de dissocier la propriété du sol de celle des arbres. EcoTree fait l’acquisition de terres en friche ou anciennement agricoles et l’on propose aux propriétaires de racheter une part de la coupe finale du massif. Ils vont pouvoir financer la totalité de leur boisement, mais ils vont devoir suivre un itinéraire sylvicole avec un document de gestion durable. Ils vont être récompensés pour partie à la coupe finale et pour totalité aux coupes intermédiaires. Sur les massifs en question, toutes les opérations nécessaires à la bonne gestion doivent être effectuées. Ce bois sur pied, on le vend à des entreprises ou à des particuliers qui ont le souhait d’agir en forêt pour l’environnement. C’est un moyen pour les entreprises de compenser leur bilan carbone. Nous nous commissionnons sur le prix de vente des arbres. Nous avons commencé à commercialiser fin 2016. L’année 2017 a été importante en matière de structuration car on vend une espérance de rendement. On a obtenu l’agrément fin février. Nous avons 200 ha qui ont fait l’objet de transactions. »

Emmanuel Naudin : « La charte « Merci le peuplier » est née en Pays de la Loire en 2011 et a été étendue grâce au Conseil national du peuplier depuis début 2014. Le Conseil national du peuplier est une association de loi 1901 qui fédère l’ensemble des organisations relatives au peuplier en France. Il est le représentant du peuplier auprès des instances internationales. Chaque perte de 1 hectare a des conséquences lourdes en matière de ressources disponibles. En prenant en compte l’ensemble des surfaces libérées généralement après exploitation et les surfaces boisées ou reboisées, on est entre 65 et 70 % de reboisement. En moyenne, une parcelle sur trois n’est pas reboisée. Le peuplier est une essence très utilisée. On ne constate aucune surexploitation actuellement. On récolte des peuplements qui sont mûrs. En revanche, il y a un vrai déficit d’action après ces coupes. La charte « Merci le peuplier » est un engagement des entreprises de la filière qui doit aider le propriétaire dans son reboisement. »