Manuel Valls, Premier ministre, vient de présenter le bilan du plan national de lutte contre le travail illégal 2013-2015 et annoncer un plan national de lutte contre le travail illégal 2016-2018, qui renforcera encore davantage le caractère prioritaire de la lutte contre la fraude au détachement grâce notamment aux apports du projet de loi travail.

Avec 285 000 travailleurs détachés déclarés en 2015, la hausse continue. Le BTP et les entreprises de travail temporaire regroupent à eux deux plus de la moitié des travailleurs détachés en France. La fraude au détachement est aussi en augmentation et les contrôles se sont fortement accentués. De 600 interventions par mois au 1er semestre 2015 ils sont passé à 1500 aujourd’hui. Depuis juillet 2015, près de 300 amendes administratives ont été notifiées pour un montant cumulé de 1,5 M€ ; 20 fermetures préfectorales ont été prononcées ; 6 entreprises se sont vues suspendre leur prestation de service internationale. Les contrôles contre le travail illégal sont davantage ciblés : en 2014, 57 300 établissements ont été contrôlés, le BTP représentait 38 % des contrôles.

Le nouveau plan national va se développer sur trois axes : faire évoluer la réglementation européenne, renforcer les coopérations opérationnelles entre Etats membres, et renforcer les leviers de contrôle grâce à la loi travail.

Au niveau européen, la France plaide résolument pour réviser la directive européenne « de base » de 1996 sur le détachement, au-delà des avancées obtenues en 2014. Une étape capitale a été franchie en mars dernier : la limitation de la durée du détachement ; la « rémunération minimale » (notion plus large) et non seulement le « taux de salaire minimum » de l’Etat d’accueil comme plancher de rémunération ; mêmes conditions de travail et d’emploi pour les travailleurs intérimaires détachés ou locaux ; l’application du principe « à travail égal salaire égal dans un même lieu ». La France veut aller plus loin avec l’interdiction des détachements en cascade de salariés intérimaires ; une relation salariale minimale de 3 mois entre le salarié détaché et son entreprise pour éviter les embauches opportunistes ; l’inclusion des conditions d’hébergement dans le « noyau dur » des droits devant être respectés par les employeurs de salariés détachés.

Au niveau national, le projet de loi travail parachève la construction engagée en 2014 d’un arsenal juridique complet :
– garantir que les salariés détachés seront bien déclarés: en cas d’absence de déclaration, les prestations de service internationales seront suspendues par le ministère du travail, les donneurs d’ordre auront la responsabilité de veiller au respect de l’obligation de déclaration chez leurs sous-traitants et seront sanctionnés en cas de manquement ;
– encadrer davantage le recours aux salariés détachés dans l’intérim, où les fraudes sont nombreuses,
– création de dispositions spécifiques dans le secteur agricole, pour renforcer les moyens de lutte contre la fraude dans ce secteur;
– mise en place d’un « droit de timbre » pour toutes les entreprises étrangères qui détacheront un salarié en France, afin de compenser les coûts liés au système de déclaration dématérialisé.