Être performant et le montrer Chercher à labelliser ou à certifier un bâtiment est une démarche volontaire. L’objectif, pour le professionnel, est de prendre de l’avance sur les réglementations thermiques à venir et de faire attester son savoir-­faire. C’est aussi un moyen d’améliorer ses compétences en matière de qualité énergétique grâce aux référentiels des certifications et labels. Enfin, ceux-ci offrent aux maîtres d’ouvrage une preuve concrète que le professionnel choisi est capable de mener à bien leur projet. La dernière réglementation thermique (RT 2005) a renforcé de 15% les exigences de performance énergétique des bâtiments neufs par rapport à la réglementation thermique précédente. Le dépassement de ces exigences peut aujourd’hui être valorisé au moyen de l’un des cinq niveaux de performance du label HPE, fixés par l’arrêté du 27 juillet 2006 (mis à jour dans l’arrêté du 3 mai 2007). On dénombre les labels HPE et THPE qui peuvent être respectivement attribués à des bâtiments ayant une consommation globale d’énergie inférieure de 10% et 20% à la consommation de référence RT 2005. Les labels HPE EnR et THPE EnR imposent en plus le recours à des énergies renouvelables pour le chauffage et l’eau chaude. Le label BBC-­Effinergie concerne quant à lui des bâtiments ayant une consommation énergétique globale inférieure à 50kWh/m2/an. BBC-Effinergie : la norme en 2012 Le référentiel BBC a été mis au point par l’association Effinergie. Créé en mai 2007, ce label concerne aujourd’hui près de 22000 logements. Il tient compte des spécificités géographiques françaises et pondère ainsi les exigences en fonction de l’altitude et de la zone climatique (de 40 à 75kWh/m2/an). Ce label est cependant critiqué, car il n’irait pas aussi loin qu’il le laisse penser. Certains matériaux, équipements ou systèmes de chauffage performants peuvent ne pas répondre aux critères du label. De même, celui-ci n’impose aucune exigence sur la qualité de l’enveloppe et les calculs privilégieraient les dispositifs de production d’énergie par rapport à la conception du bâtiment. Pour ­Catherine ­Bonduau, directrice de l’association Effinergie, « tout dépend de la manière dont on voit les choses. Le label utilise les mêmes méthodes de calcul que la RT 2005. Le prochain moteur RT devrait être mieux adapté au bâtiment BBC et toutes les critiques qui ont cours aujourd’hui ne seront plus, j’espère, d’actualité ». Disposant d’une véritable assise juridique, ce label ouvre droit à de multiples avantages pour le maître d’ouvrage : réduction de la taxe foncière, extension du COS (coefficient d’occupation des sols), crédit d’impôt, prêts à taux zéro… Passivhaus et Minergie : trop exigeants ? Il est étrange de constater que ces incitations ne sont pas accordées à des bâtiments disposant de labels plus anciens et reconnus au niveau européen comme le label d’origine allemande Passivhaus ou le label suisse Minergie. Ces deux labels vont a priori plus loin que la prochaine réglementation thermique. Selon ­Jérémie ­Bellet, directeur de l’association Prioriterre qui délivre les labels Minergie en France, « il est possible, selon les communes, d’obtenir une augmentation du COS de 20 ou 30% avec un label Minergie ». Même son de cloche pour ­Anne ­Gérin, chargée de la communication et des relations publiques de l’association La Maison passive France : « Certaines ADEME ou certaines banques agissent au niveau local, mais aucune action nationale n’est menée. » Pourtant, ces deux labels importés bénéficient d’une grande notoriété sur le territoire français, à tel point qu’on voit régulièrement des doubles labellisations : une Effinergie pour obtenir les aides et une Passivhaus ou Minergie pour la crédibilité. Difficile cependant de comparer ces labels en termes de performances, car leurs calculs ne prennent pas en compte les mêmes éléments. (Voir tableau). À priori plus exigeants que le label BBC-­Effinergie, ils garderont toute leur raison d’être une fois la prochaine RT en vigueur. Ceci est surtout vrai pour les labels passifs que sont Minergie-P et Passivhaus. Les labels de demain seront passifs « Aujourd’hui, tout le monde se met au BBC, mais le noyau dur des gens convaincus vise aujourd’hui le bâtiment passif », annonce ­Catherine ­Bonduau. De nouveaux labels sont ainsi à l’étude. Pour l’association Prioriterre, l’objectif est d’avoir une légitimité en France. Ses membres tentent donc de créer leur propre label BBC qui intégrera Minergie, superposé à certains aspects de la méthode HQE (BBC Prioriterre), et de devenir certificateur au même titre que Promotelec, Cequami, Cerqual et Certivea. « Quoi qu’il en soit, le label Minergie et, surtout, notre label Passif Minergie-P resteront d’actualité en 2012 car ils sont à priori plus performants que la future RT », poursuit le directeur de l’association. Le Grenelle de l’environnement vise le bâtiment à énergie positive pour 2020. « Le risque, c’est que les gens installent des panneaux photovoltaïques sur des bâtiments très énergivores, ce qui n’aura aucun effet sur les émissions de CO2 »,explique la responsable de La Maison Passive France. Même si Effinergie travaille à l’élaboration d’un label destiné aux bâtiments à énergie positive, ­Catherine ­Bonduau nous rassure : « Les régions et les collectivités souhaitent passer par l’étape passive. Au niveau local, on va ainsi voir disparaître les aides en faveur du BBC au profit du passif et de la rénovation. » L’association travaille donc à son propre label passif qui sera cependant moins exigeant, avec des niveaux différents selon les régions. Un rôle à jouer en rénovation Autre évolution à venir, la rénovation. Chez Effinergie, on aimerait voir la mise en place d’une réglementation propre à l’existant. « Le rôle du label est de montrer le champ des possibles, grâce aux réalisations qu’il permet, ceci afin d’aider à concevoir les futures réglementations », explique la directrice de l’association. Le label BBC-­Effinergie Rénovation, lancé après la publication de l’arrêté du 29 septembre 2009 relatif au contenu et aux conditions du label HPE en rénovation, concerne déjà près de 123 maisons individuelles et 27 opérations de logements collectifs. Les régions se mobilisent également sur le sujet et prévoient déjà de nombreux appels d’offres dans ce domaine. L’association Prioriterre se dit prête, de son côté, à développer la partie rénovation, « mais avec une exigence de 60kWh/m2/an, l’objectif est trop difficile à atteindre en France ». Pourtant, de nombreux maîtres d’œuvre s’intéressent à ce marché en plein essor et visent déjà la labellisation Passivhaus. « La différence entre un bon BBC et le niveau passif est minime, explique Anne Gérin. Alors, quand on explique que ça ne coûte finalement pas beaucoup plus cher d’aller jusqu’au passif, beaucoup n’hésitent pas à sauter le pas, même en rénovation. » Plus les exemples de bâtiments labellisés se multiplieront, plus les réticences et les inquiétudes tomberont. ­Catherine ­Bonduau appelle cependant à la vigilance : « Il ne faut pas s’enfermer derrière un objectif de label, appliquer les méthodes de calcul et en oublier la conception architecturale. Car au-­delà de la notion de performance énergétique, il y a l’homme, pour qui l’on doit créer un environnement sain et agréable. » Aurélie Cheyssial « Les collectivités souhaitent passer par l’étape passive. »