Acquis en novembre dernier par la compagnie des Architecteurs, le siège social prend place au sein d’un immeuble fin 18e siècle dont les deux rez-de-chaussée sont situés à des niveaux différents. Les 360m2 de bureaux s’étendent sur 40 mètres de long et toute la problématique architecturale du projet fut de faire de ce couloir un lieu qualitatif. Les architectes, Michel Debizet et Jacques Paul (Architecture Station), sélectionnés au sein du réseau des Architecteurs, ont découpé l’espace autour des différentes vocations du site, à savoir : un lieu pour les salariés, une zone pour les sociétaires du groupe, une vitrine commerciale et, enfin, un pôle de recherche. Au final, une rue intérieure fédérera huit bureaux permanents, une vaste salle de réunion, un pôle d’accueil et un atelier de formation. De la paraffine pour l’inertie L’essentiel du projet a d’abord consisté en une isolation soignée. Sans possibilité d’agir sur la façade, il a fallu isoler très fortement l’enveloppe, à l’exception des parois chauffées. « Ici, on a pris le taureau par les cornes, en utilisant des épaisseurs d’isolant de 16, 18 et 20cm pour les murs, avec un lambda de 0,029W/(m.K) » annonce Dusan Novakov, ingénieur en énergies renouvelables. Pour certains points singuliers, comme les ébrasements, c’est un isolant sous vide qui a été choisi afin de ne pas perdre en lumière naturelle. Le travail d’isolation est également important au niveau des planchers (lire encadré ci-dessous) ; pas d’isolant, en revanche, sur les parois chauffées comme le plafond. Côté menuiseries, une méthode efficace en rénovation a été employée pour les baies donnant sur la cour. Les anciennes fenêtres ont été conservées afin de ne pas rompre avec l’aspect initial, mais on a installé des fenêtres à double vitrage à l’intérieur pour obtenir une double peau. À l’étage, toutes les baies sont équipées d’un triple vitrage et leurs parties hautes ont été recouvertes d’un verre aérogel qui diffracte la lumière du jour afin de compenser la perte de luminosité. Avec une telle isolation, la température monte vite, principalement dans la salle de réunion qui peut contenir plus de trente personnes. Pour pallier ce problème, l’idée a été d’utiliser des plaques à changement de phase. Dès 21,6°C, la paraffine qu’elles contiennent va commencer à fondre, c’est-à-dire à absorber de l’énergie qu’elle restituera quand la température descendra de nouveau. Un air soigné L’étude des lieux a révélé la présence, sur une centaine de mètres carrés, d’un vide sanitaire sur cave voûtée. « Cette découverte nous a incités à revoir à la hausse nos exigences en matière d’économies d’énergie », explique l’architecte Michel Debizet. Une sorte de puits canadien a été imaginé, appelé pour l’occasion « puits parisien ». Ce dispositif réchauffera ou refroidira l’air neuf par échange géothermique afin d’améliorer le rendement de la ventilation double flux des bureaux et de l’entrée. Les locaux combinent en effet deux systèmes de ventilation double flux. Le second, doté d’un échangeur commandé par une sonde de CO2, sert à la salle de réunion. Un mur d’eau végétalisé vient ensuite parfaire le système. Il servira à humidifier et à purifier l’air intérieur grâce à la présence de plantes dépolluantes ; il fera également office de « masse tampon » pour le rafraîchissement en été. Mesurant quatre mètres de haut, ce mur végétal s’étend sur les deux niveaux du bâtiment, le long du couloir. Il stockera près de 3200 litres d’eau de pluie récupérés sur une petite toiture dans la cour, une eau qui servira aussi à alimenter les chasses d’eau des sanitaires. Bien que situés en rez-de-chaussée, les bureaux privilégient au maximum la lumière naturelle. Aucun poste de travail n’est ainsi éclairé en second jour. « Le problème, c’est que la réglementation en matière d’éclairement des bureaux induit des consommations énormes !, se plaint Dusan Novakov. Nos premiers calculs faisaient état d’une production de chaleur par les lampes de 42kWh/m2/an, alors que pour le chauffage, je n’ai besoin que de 5,1kWh/m2/an ! » Pour ramener cette production de chaleur à 26kWh/m2/an, l’équipe a opté pour un mélange de LED et de lampes basse consommation activées par des détecteurs de présence. Des pompes à chaleur devenues inutiles ? Pour chauffer l’ensemble des locaux, deux pompes à chaleur sont installées en cascade. En intersaison, et l’hiver, la récupération sur une VMC double flux se fait à l’aide d’une PAC thermodynamique qui servira pour le chauffage et l’eau chaude (puissance globale de 1,5 à 3kW). Pour les températures très basses, la seconde pompe à chaleur air/eau viendra en relais. Selon Dusan Novakov, « la première pompe à chaleur devrait suffire et il y a même de grandes chances, si tous les locaux sont occupés, que les pompes à chaleur ne servent à rien ». La production des pompes à chaleur est ramenée sur un ballon tampon qui viendra alimenter les différents secteurs de chauffage par le sol. Les boucles du plancher chauffant sont découpées par zone, ce qui évite de chauffer les parties inoccupées. Alimentés de la même façon, quelques radiateurs à ailettes et une armoire forte récupérés sur place serviront néanmoins de dispositifs radiants. En été, le rafraîchissement de l’air se fait par échange air/eau, via un plancher chauffant refroidi sur le « puits parisien ». Les concepteurs misent également sur une surventilation nocturne naturelle. « Nous atteindrons une température maximale de 26°C pendant neuf jours/an », estime Dusan Novakov. Selon les calculs de l’ingénieur, cette rénovation répondrait au standard passif. Elle aura coûté 1500 euros HT le m2, au lieu des 800 à 1000 euros d’une rénovation classique dans Paris. Aurélie Cheyssial Puits parisien et isolation Dans le vide sanitaire, les tubes caloporteurs ont été enrobés dans un radier en terre battue sur lequel est posé un film réfléchissant vers le bas. Au-dessus viennent s’ajouter 30cm d’isolant puis un autre film réfléchissant, disposé vers le haut cette fois. Les tubes destinés au chauffage par le sol sont ainsi totalement isolés du dispositif géothermique. Une dalle béton vient recouvrir l’ensemble. Fiched’identité Maître d’ouvrage : compagnie des Architecteurs Maître d’œuvre : Architecture Station Bureau d’études/conseil : Dusan Novakov, ingénieur ENR, partenaire Minergie