Avec le temps, l’ITE s’étend

Sous les feux de la rampe avec les nouvelles réglementations thermiques visant à terme les performances de la maison passive, l’isolation thermique par l’extérieur, plus connue sous le diminutif d’ITE, ne manque pas d’atouts. Technique constructive encore minoritaire en France, elle s’étend petit à petit en neuf comme en rénovation. Le secteur de la construction doit jouer un rôle clé dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Les voies de progrès sont aujourd’hui clairement identifiées. Si l’usage des équipements, et notamment l’utilisation des énergies renouvelables doit être une de ces voies, l’amélioration de l’isolation des bâtiments demeure l’axe prioritaire pour les professionnels dans l’objectif de réduire la consommation d’énergie. En France, les professionnels de la construction, résidentielle ou tertiaire, privilégient l’isolation des bâtiments par l’intérieur. Imbattable économiquement, mode constructif éprouvé, cette technique plus largement utilisée en France que l’isolation extérieure a comme principaux inconvénients de modifier les dimensions des surfaces habitables et de laisser de nombreux ponts thermiques. Au regard des défis environnementaux que l’industrie de la construction doit aujourd’hui relever, l’intérêt pour l’isolation extérieure est grandissant sur le marché français. Selon une étude réalisée par la société Schöck, spécialiste des rupteurs de pont thermique de structure, auprès de ses clients et prospects en France, 10 % des personnes interrogées utilisent d’ores et déjà la technique d’isolation en « mur manteau ». Les résultats de cette enquête traduisent également une tendance à l’accroissement du marché : environ 30 % des personnes interrogées s’orientent vers l’isolation extérieure.

bâtiment ITE

Photo : Retiwood

Le bardage, techniquement européen

Sur le terrain, Nicolas Crantelle, chef de centre de la Smac (Toulouse-secteur Façade), « ensemblier » de façade, voit également se lancer le phénomène, mais n’en déduit pas pour autant un courant. « Le surcoût de l’ITE (NDLR : entre 5 et 10 %) reste un frein même si la conscience des problèmes des ponts thermiques avec l’isolation intérieure est présente. » En terme de répartition, la Smac, qui travaille à 99 % avec des panneaux Trespa, en pose 70 % uniquement en parement et 30 % associés à une ITE. Gilles Frénois, président du directoire de Vétisol, spécialiste depuis 25 ans de l’ITE, assiste à une augmentation de la demande depuis un peu plus de deux ans et a vu également une réelle évolution dans la destination de l’ITE : ”Au début, c’était 100 % de rénovation, petit à petit, nous nous sommes attaqués au marché du neuf et, aujourd’hui, nous sommes à 50/50.” Quelle est la raison de ce soudain intérêt pour cette forme d’isolation trentenaire ? ”Sans hésitation, la poussée réglementaire qui oblige à une vraie prise de conscience.” Pour recouvrir l’ITE, les solutions principales sont les enduits, les bardages rapportés ou encore les vêtures. ”La tendance s’oriente plutôt vers le bardage (c’est-à-dire un isolant séparé du parement) car techniquement européen. La vêture, elle, serait plus une technique française”, explique Gilles Frénois. De plus, le bardage est présent depuis plusieurs dizaines d’années, et le choix des matériaux est plus large. Aluminium, acier ou zinc, ardoise, béton, terre cuite, bois, stratifiés et dérivés, céramique, etc., il y en a pour tous les goûts.

ITE

Photo : Rockwool

Les isolants thermiques

Le choix de l’isolant thermique est également multiple, mais, certes, moins diversifié. Les principaux étant les laines minérales, de roche ou de verre, et la mousse polyuréthane. Gilles Frénois précise qu’il n’y a aucune relation entre le choix de l’isolant et celui du parement car ils ont deux fonctions différentes. Gilles Guyoton, chef de marché chez Rockwool, ne jure logiquement que par la laine de roche dont les performances acoustique, thermique d’hiver et d’été (grâce à sa densité), feu et environnementale justifient, selon lui, leur créneau monoproduit. ”Même si la RT 2010 durcit les exigences, nos solutions Rockbardage et Rockfaçade ou, pour une structure légère, Rockwool 431 pour mur béton, par exemple, ont encore de la marge.” Nicolas Crantelle a, lui, plus l’habitude de travailler avec de la laine de verre dont il apprécie les panneaux plus légers et moins rigides que ceux de laine de roche. ”D’autant que la laine de verre étant non hydrophile, il suffit, par temps de pluie, d’attendre 48 heures qu’elle ait dégorgé. En principe, on plaque nos panneaux Trespa au fur et à mesure en cas de temps menaçant.” Clément Benhamou, de Retiwood, serait, lui, plutôt favorable à la laine de chanvre et à l’isolant réflecteur mince thermoactif. ”Le problème avec les isolants minéraux est qu’ils sont composés de fibres très fines qui, si la cohérence de l’isolant se dégrade un jour, se retrouvent dans l’air. Mais, à choisir, la laine de roche est moins toxique que la laine de verre.” Bref, à chacun sa préférence. Le fait que l’isolant soit déjà posé sur les murs extérieurs de la maison permet d’emblée de diminuer de moitié les pertes d’énergie. Et pour que cette tendance quasiment omniprésente chez nos voisins allemands ou suisses, entre autres, se généralise en France, la formation devra jouer un rôle prépondérant. Sans elle, on ne pourra pas passer de 95 % d’isolation intérieure à 95 % d’ITE. Gilles Frénois en est également convaincu. D’ailleurs, « un vrai centre de formation agréé est à l’étude cette année, lequel verra certainement le jour en 2009 ».

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Photo : Placo

Avantages/inconvénients

Inconvénients

    • Le coût d’isolation est élevé
  • Obligation de traiter l’ensemble des murs pour un résultat optimal
  • La technique est délicate et doit être confiée à un professionnel qualifié
  • Elle trouve ses limites dans le cas d’habitations dont l’aspect extérieur doit être conservé
Avantages
    • Elle ne modifie pas les dimensions des surfaces habitables et permet de traiter un grand nombre de ponts thermiques
  • Elle protège les murs des variations climatiques
  • Elle permet une remise à neuf de la façade
  • Une épaisseur de 10 cm d’un isolant extérieur équivaut à 20 à 25 cm du même isolant intérieur