Le groupe de travail « Innovation » du Plan Bâtiment Grenelle vient de publier son rapport définitif. Un document qui renouvelle la vision d’un secteur « traditionaliste » et met en lumière le gisement d’innovations que la filière du bâtiment doit aujourd’hui exploiter pour atteindre le facteur 4.  Lancé en mai 2010 par le Plan Bâtiment Grenelle, le groupe de travail « Innovation », co-piloté par Inès Reinmann, associée chez Axcior Corporate Finance, et Yves Farge, membre de l’Académie des technologies, a rendu son rapport « Leviers à l’innovation dans le secteur du bâtiment ». Objectif de ce travail : ouvrir de nouvelles pistes en termes d’innovation dans le bâtiment sur l’organisation de la filière, la réglementation et la législation, le financement, l’assurance et la certification, la copropriété, la mesure et la vérification, et les chaleurs récupérables. Douze propositions ont été formulées pour inciter décideurs et grand public à changer de point de vue sur un secteur encore perçu comme traditionnel, et pourtant en plein bouillonnement créatif, et primordial pour notre économie. Innover partout, innover pour les utilisateurs et innover dans le processus, tels sont les trois axes autour desquels ont été élaborées les propositions d’innovation. Innover partout  Innover partout, c’est innover à toutes les échelles géographiques (locale, nationale, internationale) et à tous les niveaux : scientifique, technologique, organisationnel, financier et commercial. Sur le plan géographique, les différentes échelles offrent en effet leurs propres opportunités d’innovation. Au niveau local, les clusters, les pôles d’innovation, les chambres de métiers et de l’artisanat ou encore les chambres de commerce et d’industrie fédèrent les initiatives et permettent de faire émerger des innovations en se concentrant sur la demande et le dialogue entre acteurs de terrain. A l’échelle nationale, c’est la puissance de recherche, de créativité et de mise sur le marché de grands groupes ou organismes publics qui permet à des innovations de se développer. Au niveau européen et international, l’élaboration de programmes communs et l’importation d’innovations étrangères représentent un potentiel d’évolution important pour le secteur.

Cartes des compétences territoriales repérées

Innover, c’est aussi d’abord s’inspirer de ce qui se fait, le copier, que ce soit chez un partenaire ou à l’étranger. Le potentiel innovant de la France prise séparément est faible vis-à-vis de celui découlant d’une observation à l’échelle mondiale. En ce sens, copier une innovation depuis différents lieux ou secteurs d’activité doit devenir un réflexe salutaire. Sur le plan thématique, les professionnels confrontés à un besoin d’innovation n’en voient souvent que la dimension technologique. Les acteurs du bâtiment ne se sentent alors pas tous concernés par l’innovation. Or, les membres du groupe de travail sont convaincus que le bâtiment et l’immobilier recèlent un potentiel d’innovation très important, dès lors que celle-ci est comprise dans un sens large. L’ensemble des champs d’innovation possibles est vaste. Avant tout, leurs combinaisons ouvrent un potentiel encore peu exploité par l’ensemble des acteurs de la filière. Il convient donc de faire évoluer la définition « populaire » de l’innovation vers celle de l’OCDE* incluant les activités scientifiques, technologiques, organisationnelles, financières et commerciales. Répondre aux besoins  Innover pour les utilisateurs, c’est sortir du carcan de la technicité de l’innovation dans le bâtiment et promouvoir la vision du bâtiment comme un service : les besoins des utilisateurs sont placés au centre de toutes les attentions. Contrairement à d’autres secteurs, l’innovation n’est pas systématiquement une réponse au marché. Une vision partielle du sujet favorise ce comportement : le bâtiment est vu comme un ouvrage technique et non comme un service rendu à un usager. Dès lors, l’innovation est fréquemment une réponse technique à un problème technique. Les technologies doivent être mises au service de l’utilisateur. Il s’agit en fait d’apporter des réponses économiques, sociales et environnementales à des besoins d’amélioration d’un service et de passer ainsi à la performance d’usage. Vers une plus grande compétitivité  Innover dans le processus, c’est innover sur les aspects organisationnel, contractuel ou réglementaire, pour gagner sur les coûts, la qualité, la performance et par conséquent la compétitivité des entreprises. Afin de passer d’une obligation de moyen à une exigence de résultat, le secteur du bâtiment doit évoluer d’un processus aujourd’hui séquentiel à un processus intégré. Il s’agit, pour l’ensemble des acteurs, depuis le promoteur immobilier jusqu’à l’entreprise de démolition, de favoriser des logiques de travail en commun et de mutualisation des compétences, à commencer par la conception partagée entre tous les acteurs du projet, à l’image du monde de l’automobile. L’enjeu se situe en termes de coûts et de qualité : fabrication des produits et conception des procédés, mise en oeuvre en construction ou en réhabilitation, exploitation et maintenance, utilisation. Il s’agit aussi bien de performance énergétique et d’usage, que de performance économique : les entreprises françaises du bâtiment doivent exploiter le gisement de compétitivité qui s’offre à elles. A travers ces trois mots d’ordre, ce sont quatre champs d’action qui ont été dégagés pour décliner les douze propositions du rapport : innover dans la filière du bâtiment ; territorialiser l’innovation ; financer et innover ; innover par l’assurance et la certification.

*Organisation de coopération et de développement économique