Quatre mille établissements, 60millions de mètres carrés de locaux, un million de salariés… Le secteur de la santé constitue un formidable potentiel pour impulser des changements importants dans la société. L’engagement de l’hôpital dans des démarches de promotion du développement durable représente donc un enjeu majeur pour l’atteinte des objectifs ambitieux du Grenelle Environnement. Les établissements de santé et le développement durable partagent d’ailleurs une communauté de valeurs : prendre soin, améliorer le quotidien et la qualité de vie, prévenir et guérir, penser à l’avenir, s’occuper de tous sans discrimination… sont quelques-uns des piliers du système de soins français et des objectifs d’une politique socialement responsable. Les hôpitaux sont concernés par le Grenelle Environnement et par les enjeux du développement durable à plus d’un titre : en tant qu’acteurs de santé publique, dans les domaines de la prévention, de l’éducation à la santé, du dépistage ; ils sont également des acteurs de la gestion des risques sanitaires liés à l’environnement ; en tant que structures consommatrices de ressources et acheteurs de biens et services ; en tant que producteurs de déchets et émetteurs de gaz à effet de serre, dont l’empreinte environnementale et leur capacité à influencer le marché sont importantes ; enfin, en tant qu’employeurs et acteurs sociaux de nombreux territoires. Un secteur qui évolue Les secteurs santé, sanitaire, social et médico-social connaissent de profondes mutations qui invitent tous les acteurs de la société française à se mobiliser, comme en témoignent les diverses mesures gouvernementales prises ces dernières années : Plan Hôpital 2012 qui succède à celui de 2007, Plan Solidarité Grand Âge, Plan Alzheimer, Plan Handicap Visuel 2008-2011, projet de loi sur la création par la Sécurité sociale d’un 5e risque Dépendance… Ces différents plans mettent en exergue la nécessaire modernisation des établissements de santé, publics et privés, et l’adaptation de l’offre de soins aux évolutions en cours tout en garantissant l’efficience du système. Or, si la qualité du service hospitalier fait déjà l’objet d’une certification exigeante de la Haute Autorité de Santé (HAS), les enjeux environnementaux du bâti proprement dit sont également à considérer : consommations d’énergie, émissions de CO2 (22 établissements sont sous quotas CO2 limitatifs, pour plus de 260000 tonnes annuelles), qualité des matériaux utilisés, insertion dans l’environnement… La construction durable constitue un enjeu majeur de ce marché dans les années à venir. Les établissements de santé sont plus que jamais concernés par la notion de performance énergétique. Une certification « NF Bâtiments tertiaires – démarche HQE® » destinée aux établissements de santé a d’ailleurs été élaborée par Certivea (filiale du CSTB). Son objectif : attester que les constructions ou réhabilitations d’établissements de santé, comme les hôpitaux, respectent les quatorze objectifs fixés par la Haute Qualité Environnementale. On compte, à ce jour, cinq opérations certifiées (voir tableau page 28) et une dizaine en cours de certification. Une convention pour aller plus loin Autre action allant dans le sens du développement durable, la mise en place, en 2008, par la Fédération hospitalière de France (FHF) et PG Promotion, d’un outil pour mesurer la réalité et l’ampleur des démarches engagées à l’hôpital : le Baromètre du développement durable en établissement de santé. Il s’agit d’une étude unique en France qui donne une photographie des actions écoresponsables entreprises par les hôpitaux et évalue la perception des enjeux d’un nouveau mode de fonctionnement. Pour poursuivre cette démarche, et lui donner une dimension politique et opérationnelle, les fédérations hospitalières ont souhaité formaliser leur engagement par la signature d’une convention avec le ministère de l’Écologie, le ministère de la Santé et l’ADEME, partenaire historique du baromètre. Ce texte ambitieux a pour but de non seulement donner un signe fort d’encouragement aux établissements déjà engagés et pionniers, mais également d’inciter les autres à s’interroger et à modifier leurs pratiques. La convention établit des objectifs dans tous les domaines où l’impact de l’hôpital est important et peut être amélioré. Et, surtout, elle met en place des critères de progrès avec des objectifs de progression ambitieux et généralement supérieurs aux engagements du Grenelle. Ces axes de progrès portent sur le management et la gouvernance des établissements de santé, les économies d’énergie et d’eau, l’écoconstruction, la réduction des gaz à effet de serre, la gestion des déchets et des effluents, la politique d’achat, la communication et la formation. Eau, énergie, déchets Dans le domaine de la consommation d’eau et d’énergie, il s’agit d’optimiser la gestion des flux dans les bâtiments et de développer le recours aux énergies renouvelables. Compte tenu des spécificités des activités de soins (permanence de fonctionnement des installations, sécurisation des équipements…), la maîtrise de la consommation énergétique ne concerne pas, ici, les plateaux techniques comme les blocs opératoires, les services d’imagerie médicale, les laboratoires d’analyse… Ces activités sont incitées à maîtriser leur dépense énergétique par le choix d’équipements moins énergivores, dans la mesure où l’offre existe et à service médical rendu équivalent. La diminution de la consommation d’eau dans les établissements de santé est un objectif prioritaire. Elle ne doit cependant pas se faire au détriment de l’hygiène, qu’il s’agisse du lavage des mains et des surfaces ou de la prévention de la légionellose par soutirage régulier de l’eau des robinets peu utilisés. Les efforts portent principalement sur le changement des comportements des personnels hospitaliers et des patients ainsi qu’à la mise en place progressive d’équipements moins consommateurs. Côté énergie, les établissements de santé doivent intégrer des critères HQE dans tous les bâtiments neufs et tendre vers des objectifs de Très Haute Performance Énergétique pour les bâtiments concernés par des activités tertiaires, tout en prenant acte des spécificités liées aux activités de soins. Le parc existant doit faire l’objet d’audits énergétiques pour connaître la consommation d’énergie par mètre carré ; toute action de rénovation lourde doit comprendre un volet « énergétique ». S’agissant des énergies renouvelables, il faut poursuivre et favoriser le recours à celles-ci lors de constructions neuves, de rénovations lourdes des bâtiments ou de remplacement d’installations thermiques au regard des possibilités techniques et économiques (solaire, bois, géothermie…). Enfin, dans le domaine des déchets, la convention prévoit de mettre en place une démarche globale de réduction à la source, de tri, et d’optimisation de la valorisation des déchets produits par les établissements de santé. L’exemplarité dans la filière de recueil et traitement des déchets de soins (DASRI) est liée au respect de la réglementation abondante existant depuis 1975. S’agissant des déchets assimilables aux ordures ménagères (DAOM) et de certaines catégories de déchets d’activités de soins, les établissements de santé s’engagent à en améliorer le tri, le recyclage et la valorisation ainsi qu’à en diminuer la quantité produite. Eau, énergie, déchets, mais aussi transports, achats, communication, formation… dans tous les domaines concernés par la convention, des objectifs précis ont été définis à l’horizon 2011 avec une étape intermédiaire en 2010. Un premier bilan devrait donc bientôt permettre de mesurer la réalité de l’engagement.  Frédérique Imbs