Les technologies modernes à la disposition des architectes et des entreprises spécialisées permettent d’apporter des solutions concrètes et efficaces aux désordres dus au temps ou aux aléas climatiques, dans les structures ou en sous-sol.

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Les sols déstabilisés de cette maison parisienne ancienne sont traités par la technique Deep Injection. Le camion-atelier alimente le chantier en résine expansive.
Photo : AC

Le système Deep Injection mis en œuvre par la société Uretek consiste à injecter de la résine expansive dans les sols déstabilisés : d’abord la résine se diffuse et comble les vides, puis elle s’expanse et compacte la matière. Sa spectaculaire force de gonflement peut dépasser 10 000 kPa. Voici un exemple probant sur un chantier parisien récent : la maison s’affaissait, quelques fissures étaient apparues. Le sol était devenu instable et un réseau d’eau souterrain en mauvais état accroissait les désordres. Une étude de sol géotechnique a d’abord été réalisée par Uretek en collaboration avec l’architecte afin de déterminer à quelle profondeur se trouvait la couche saine. Les résultats ont permis de définir les niveaux d’intervention.

Dans cette maison, la résine – provenant d’un camion-atelier garé dans la rue – a été injectée sur trois niveaux : le premier sous les fondations, à 1 m de profondeur, le second à 2 m et enfin le dernier à 3 m. Marco Pagani, chef de chantier Uretek, commente les opérations : « Nous avons foré des trous d’un diamètre légèrement inférieur à 3 cm tous les 45 cm jusqu’à atteindre le niveau − 1. Puis d’autres forages ont été effectués jusqu’aux niveaux − 2 et − 3. Dans la même zone, on perce donc des trous différents. Nous y avons ensuite inséré des tubes qui ont permis d’acheminer la résine jusqu’à la profondeur souhaitée. » Le temps d’injection dépend de l’espace à remplir, et la résine ne se diffuse pas à plus de 2 m du point d’injection. Un laser est positionné dans la zone à traiter, dont le faisceau permet de détecter et de mesurer le redressement du bâtiment. Dès que les vides du sous-sol sont comblés, une réaction du faisceau est visible. « Ici, reprend Marco Pagani, la structure du bâtiment est remontée d’environ 1 mm. »

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Hauteville House, vue générale. Photo : DR

Diagnostic dans la demeure d’exil de Victor Hugo

Hauteville House, à Saint-Pierre-Port dans l’île anglo-normande de Guernesey, est la maison où vécut
Victor Hugo pendant son exil, à partir de 1856. Transformée en musée, elle appartient depuis 1927 à la mairie de Paris. Des altérations avaient été remarquées sur le bâtiment, notamment sur les façades à cause du climat marin, et l’entretien général de celui-ci méritait d’être révisé. On manquait également d’informations sur les structures et le système constructif. Un diagnostic précis de la situation a été effectué par une équipe d’experts de Stonevox, entreprise spécialisée dans les études, conseils et instrumentation des ouvrages patrimoniaux et des monuments historiques. Cécile Arrigoni, chargée d’affaires ayant suivi le projet, explique : « Des éléments structurels sont en schiste et granit, mais les pans de bois occupent une place prépondérante dans cette construction, ce fut pour nous une découverte. »

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Hauteville House : la profusion des décors intérieurs à rendu délicat l’examen de la structure du bâtiment.
Photo : DR

Le bâtiment avait dans le passé bénéficié de petits travaux de restauration, mais les incroyables aménagements et décors créés par Victor Hugo lui-même rendaient délicat l’examen de l’état réel. « Nous avons d’abord réalisé un travail de recherches dans les archives afin de bien comprendre comment le bâtiment était construit,reprend Cécile Arrigoni, puis nous avons examiné les lieux en détail, afin notamment de déterminer les éventuelles pathologies présentes et les points à améliorer dans le cadre d’un ERP. » Aucun sondage très invasif n’a été effectué : l’équipe Stonevox a utilisé un endoscope permettant de visualiser la structure en bois en passant par de petits inter­stices. L’opération a duré une semaine. « Notre méthodologie nous permet de nous mettre, en quelque sorte, à la place des bâtisseurs d’origine. Nous avons préconisé des études complémentaires à la nôtre, et nous espérons pouvoir intervenir à nouveau sur ce site quand les travaux seront décidés. »

Consolidation et protection des structures en bois dans un bâtiment du 17e siècle

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Les structures en bois des bâtiments du domaine de Beyssac ont été consolidées et traitées. Photo : S&C

Chaque année, le domaine de Beyssac, bâti au 17e siècle pour un notable de l’époque et appartenant aujourd’hui au ministère de la Défense, accueille plusieurs centaines d’enfants des personnels de l’armée en colonie de vacances. Le site fait actuellement l’objet de grands travaux de réhabilitation sous la maîtrise d’œuvre du cabinet d’architecture ESID à Bordeaux. Une toiture est restaurée et restituée en ardoises de Brive, des planchers en bois sont reconstruits, des pièces sont aménagées pour pouvoir accueillir de jeunes enfants atteints d’un handicap, et des ouvertures sont percées pour l’évacuation incendie : le chantier, qui a commencé en novembre 2013, sera achevé en juin 2014. Des traces d’anciens passages de vrillettes et de mérules sur les charpentes et les planchers d’un des bâtiments du domaine ayant été détectées, un traitement des bois s’est immédiatement imposé. Pour les charpentes, l’entreprise Dubois & Associés s’est chargée de remplacer les pièces de bois fortement dégradées et de traiter par prévention l’ensemble des éléments de structure.
La solution choisie est une formulation S&C Construction de la gamme Xilix : un produit traitant, fongicide et insecticide, efficace contre la mérule, les insectes xylophages et les termites. L’application a été opérée par pulvérisation. L’état des planchers a nécessité un remplacement complet des lames de parquet. Par prévention, ces bois ont été traités avec le même produit que celui utilisé sur les charpentes. Ces planchers seront ensuite recouverts d’un revêtement de sol en PVC.

Instrumentation d’observation des pathologies du bâti ancien

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Capteurs DeltaOhm reliés à des fils de pilier dans une église afin de décorréler les variations issues de l’onde de température journalière et celles issues d’évolutions mécaniques.
Photo : Cementys

L’entreprise Cementys, fondée et dirigée par Vincent Lamour, est spécialisée dans l’instrumentation, la surveillance et la maintenance du bâti vieillissant. À l’église de Théméricourt, dans le Val d’Oise, datant du début du 13e siècle environ, son intervention a consisté à mettre en place une instrumentation permettant de suivre le comportement structurel du haut du clocher sur une période d’un an, le fissuromètre CrackVibM5. L’église présente encore malheureusement un grand nombre de pathologies, malgré une rénovation effectuée il y a une dizaine d’années. Il a été également effectué un diagnostic de structure visant à caractériser les matériaux utilisés lors de la construction de l’église et ceux utilisés lors de la rénovation, notamment le liant employé. Autre exemple : à l’église Saint-Martin à Cormeilles-en-Parisis, également dans le Val d’Oise, plusieurs mouvements suspects avaient été observés sur les travées du chœur et dans le comble sud. Pour les ausculter, deux capteurs DeltaOhm reliés à des fils en Kevlar ont été placés entre deux fils de piliers pour décorréler les variations issues de l’onde de température journalière et celles issues d’évolutions mécaniques. Une sonde de température a aussi été posée à proximité de l’embase de ces capteurs.

 

couverture Atrium Construction Ce dossier est paru dans le numéro 63 d’Atrium Construction. Retrouvez l’intégralité du magazine sur www.kiosque21.com