
L’énergie grise des bâtiments : un calcul encore trop approximatif
Le carbone gris comprend les émissions de gaz à effet de serre produites durant l’extraction des matériaux nécessaires à la construction d’un bâtiment, leur transport, la phase de chantier, les rénovations, puis la démolition, jusqu’à la potentielle revalorisation des matériaux.
« A l’issue des Accords de Paris sur le climat, de nombreux pays ont accepté de prendre des mesures pour limiter leur production de CO2 dans la construction. Or, il n’existe pas encore de consensus au niveau international sur la façon de mesurer les émissions liées à l’énergie grise de ce secteur. Il était donc temps de proposer un livre de référence qui offre une synthèse des connaissances récentes sur le sujet. » pour Catherine De Wolf, architecte et ingénieur en génie civil en post-doctorat à Fribourg (Suisse) au Laboratoire d’exploration structurale du smart living lab.
Dans un ouvrage des recherches inédites sur l’énergie grise menées par des experts internationaux, Catherine De Wolf appelle les professionnels et les chercheurs à une prise de conscience globale et à revoir leur pratique, tout en apportant des solutions concrètes pour amener plus de transparence dans ce secteur.
La première partie de l’ouvrage montre que le calcul du carbone gris est encore approximatif et que la collecte des données reste un défi. En théorie, ce calcul applique un coefficient à la quantité de matériaux utilisée dans la production d’un bâtiment. En pratique, les éléments pris en compte par le coefficient varient d’une région à l’autre du monde, en raison de l’absence de normes et du manque de transparence de certains acteurs du domaine. « Seules l’extraction et la production des matériaux sont souvent inclues dans ce coefficient. Mais il faut aussi tenir compte de la quantité de CO2 émise lors de la construction du bâtiment et lors du transport des matériaux vers le chantier, celle liée à la maintenance et à la rénovation du bâtiment et à sa démolition », précise la chercheuse.
Pour parvenir à plus de cohérence, l’ouvrage montre comment intégrer ces paramètres dès la conception d’un bâtiment. L’usage du BIM devrait en partie aider à résoudre ce problème, selon la chercheuse. L’ouvrage propose également de mettre en place une économie circulaire des matériaux. Ceci impliquerait de développer des inventaires de matériaux usagés réutilisables dans de nouvelles constructions. Le développement de documents officiels qui décrivent l’impact de chaque matériau apporterait également plus de transparence aux ingénieurs et aux architectes.
Enfin, les auteurs exhortent les ingénieurs à inventer des matériaux toujours plus écologiques, à l’exemple des éco-ciments et des bio-ciments et à en réduire la quantité lors de constructions. Sur ce dernier point, Catherine De Wolf vient par ailleurs de lancer une initiative internationale visant à réduire le bilan carbone des matériaux dans la construction, la Structural Engineers 2050 Commitment Initiative.
Source : Mediacom – Sandrine Perroud – EPFL
Étiquettes : Bilan carbone, économie circulaire, énergie grise