Sébastien Lecornu, secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, a dévoilé 15 conclusions du groupe de travail « méthanisation », qui complètent les dispositifs de soutien mis en place par le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation. Ces propositions ont vocation à accélérer l’installation d’unités de méthanisation partout en France et répondre aux objectifs fixés par le Plan climat pour décarboner la production d’électricité.

Le lancement d’un appel d’offres pour les projets de méthanisation avec injection atypiques
Un appel d’offres spécifique sera lancé pour permettre d’intégrer des projets qui n’entrent pas dans le cahier des charges des appels d’offres existants, qui se concentrent actuellement exclusivement sur l’installation de méthaniseurs. Ces projets permettront d’accroître la production de biogaz sur des sites existants.
Cette mesure concerne une diversité de typologie de projets, sous réserve que ces projets démontrent un intérêt sur le plan économique et environnemental, comme l’extension d’une installation existante, l’adaptation de méthaniseurs existants, la transformation d’une installation de cogénération en installation d’injection dans le réseau ou de double valorisation, le regroupement de plusieurs méthaniseurs, d’épurateurs, et de points d’injection ; ou encore des projets de biométhane porté pour lesquels plusieurs installations de production mutualisent un même point d’injection,.

La mise en place d’un complément de rémunération pour les petites installations
L’État va simplifier les règles de soutien tarifaire avec la création d’un tarif de rachat à guichet ouvert pour les installations de taille moyenne de 500 kW à 1 MW plutôt que des appels d’offres trop lourds pour cette taille de projet. Cette mesure sera prise par arrêté.

La facilitation de l’accès au crédit pour la méthanisation agricole
La filière fait face à un problème d’accès au financement bancaire en raison d’une exigence d’un taux minimal de fonds propres et de garanties élevées pour bénéficier d’un financement bancaire.
Le ministre de l’Agriculture a annoncé qu’il consacrera 100 millions d’euros sur le Grand Plan d’Investissement (GPI) pour financer un fonds de garantie BPI au bénéfice des projets de méthanisation agricole.

La sortie du statut de déchets des digestats et sécurisation de leur valorisation au sol
La facilitation de la valorisation organique des digestats va permettre de sécuriser les approvisionnements des agriculteurs. Une norme adaptée et dédiée aux digestats sera élaborée avec la profession, comme il en existe déjà une sur les composts.
La possibilité de futurs cahiers des charges pour les digestats de méthanisation sera étudiée, intégrant notamment des biodéchets, sous l’égide du ministère de l’agriculture. Le code rural encadrera la sortie du statut de déchet de l’ensemble des matières fertilisantes et supports de culture fabriqués à partir de déchet, comme les digestats.

L’utilisation du bioGNV par les engins agricoles
L’utilisation du bioGNV par les engins agricoles sera rendue possible dans un avenir proche sur le territoire national à l’issue d’un travail en cours au niveau européen sur les modifications du règlement 167/2013 relatif à la réception des véhicules agricoles et de ses actes délégués (règlement 2015/96 et 2015/504).

La décarbonisation du secteur des transports
Un soutien financier sera mis en place pour les méthaniseurs qui alimentent les véhicules (bus, camions) permettant ainsi de contribuer à décarbonisation du secteur des transports et de développer un nouvel usage direct local du biométhane, en particulier lorsqu’on est loin du réseau de gaz.

La promotion des bonnes pratiques de la filière
Des formations seront mise en place pour l’ensemble des acteurs, avec un pilotage du ministère de l’Agriculture en ce qui concerne la formation destinée au monde agricole. Ce plan de formation permettra d’aider les porteurs de projets à présenter des projets limitant les nuisances et favorisant le dialogue local.
Les acteurs de la filière sont invités à s’accorder sur une charte qui concernerait tous les porteurs de projets et marquerait le respect de ces bonnes pratiques.

Le renforcement des démarches de qualité
La structuration de la filière doit permettre à chaque acteur de la chaîne de valeur (investisseurs, porteurs de projets, bureaux d’études, équipementiers, opérateurs) de s’adapter au contexte français multi-intrants et de s’insérer dans un modèle économique pérenne.

La création d’un portail national de ressources sur la méthanisation
Un portail national de ressources sur la méthanisation porté par les organisations professionnelles permettra de renforcer la connaissance par le public de la méthanisation, notamment de son intérêt pour la collectivité (lutte contre changement climatique, économie circulaire, santé, emplois…).

La simplification de la réglementation des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE)
L’État va réduire les délais d’instruction de 1 an à 6 mois et augmentera le seuil applicable à l’autorisation ICPE (100 tonnes/jour contre 60 tonnes/ jour). Ce régime d’enregistrement, plus souple, sera étendu à l’ensemble de l’activité de méthanisation ICPE, en plus du régime de déclaration possible pour la méthanisation agricole.

La création d’un guichet unique méthanisation pour l’instruction des dossiers réglementaires
Chaque préfet désignera un service de l’Etat « guichet unique » pour recevoir les différents dossiers réglementaires relatifs aux méthaniseurs (dossier ICPE/IOTA ou d’agrément sanitaire).

La simplification de la réglementation « loi sur l’eau »
Les méthaniseurs soumis à l’enregistrement ou à la déclaration ICPE seront désormais soumis au régime de « l’enregistrement », ce qui aura pour conséquence de supprimer l’étude d’impact et l’enquête publique.

L’élargissement des gisements pour la méthanisation
Passer à une échelle plus large suppose aussi de développer des méthaniseurs de grande taille et d’aller chercher les gisements à méthaniser (déchets d’industries agro-alimentaires, biodéchets, biogaz de décharge, boues de stations d’épuration). Le gouvernement en escompte une baisse progressive des coûts de production (de 100 à 80€/MWh) et le développement d’une filière française et européenne des matériels de méthanisation.
Les mélanges d’intrants deviendront donc possibles parce qu’ils sont nécessaires à la bonne performance de la méthanisation mais seulement dans des conditions de sécurité renforcées pour les terres agricoles en cas d’épandage du digestat.
Par défaut, le mélange appliquera les règles d’épandage les plus strictes s’imposant à ses composants et une règle générale de traçabilité sera définie.
Le décret ICPE pour les méthaniseurs soumis à enregistrement permettra le mélange, sauf en cas de mélange de boues de stations d’épuration avec les biodéchets et d’utilisation du digestat en épandage. Dans ce cas, un arrêté préfectoral sera requis pour définir les conditions au cas par cas.
Un groupe de travail est lancé pour écrire ces conditions. Elles seront définies avec la profession agricole.

La généralisation de la méthanisation des boues de grandes stations d’épuration
Les boues de STEP présentent un potentiel méthanogène important, que la filière rappelle régulièrement. Elles représentent un fort gisement pour le développement de la méthanisation, car seules 22% d’entre elles sont méthanisées à ce jour. Un travail avec les collectivités et les professionnels démarre pour préciser le calendrier et les soutiens. La méthanisation réduit sensiblement les volumes de boues et facilite aussi les autres usages que l’épandage.

La création d’un « droit à l’injection »
Le groupe de travail propose la création d’un « droit à l’injection » dans les réseaux de gaz naturel dès lors que l’installation de méthanisation se situe à proximité d’un réseau existant pour éviter que des projets ne soient bloqués faute de capacités. Les gestionnaires de réseau seront chargés d’effectuer les investissements nécessaires pour que cela devienne possible.