Les toitures potagères apparaissent comme un des leviers important de développement d’espaces de culture et de nature en ville, des scientifiques de l’Inra et d’AgroParisTech ont montré qu’ils constituaient un dispositif d’intérêt pour recycler les déchets urbains, produire des denrées alimentaires et retenir les eaux de pluies.

C’est au cœur de Paris, sur les toits de l’Institut des sciences et industries du vivant et de l’environnement – AgroParisTech, que les scientifiques ont installé leur potager. Pendant deux ans, au rythme des saisons, se sont ainsi succédés dans des bacs en bois (90 cm x 90 cm x 40 cm) espacés de 50 cm, salades, tomates cerise et engrais verts. Ils ont comparé trois Technosols, c’est-à-dire des sols constitués de matériaux apportés par l’homme. Les deux premiers sont composés pour moitié de compost de déchets verts et de bois broyé issus de l’entretien d’espaces verts urbains. L’un est inoculé avec des vers de terre et l’autre non. Le troisième Technosol correspond à un terreau d’origine commerciale, utilisé comme témoin. Aucun apport de fertilisants minéraux n’a été réalisé : seule la biodégradation des déchets organiques fournit les nutriments aux plantes.

Les chercheurs se sont intéressés à quatre services écosystémiques : l’approvisionnement alimentaire (quantité et qualité des récoltes), le recyclage de déchets, la régulation des eaux de pluies (quantité d’eau de pluie retenue et qualité des eaux de drainage) et le stockage de carbone potentiel de ces systèmes. Ils ont mis en évidence que les niveaux de production des bacs sont comparables voir supérieurs à ceux de jardins familiaux en pleine terre (entre 4,4 et 6,1 kg/m² par saison de culture) et proches de ceux des maraîchers professionnels en agriculture biologique de la région francilienne. Les rendements sont peu différents entre les modalités testées, les Technosols constitués de déchets urbains étant aussi (voire plus) productifs que le terreau. Les trois Technosols retiennent plus des trois quarts des eaux de pluie, contrairement à des toits nus. Quel que soit le Technosol, les teneurs en métaux lourds (Cd, Cu, Pb, Zn et Hg) des légumes sont largement inférieures aux normes en vigueur. Les déchets organiques utilisés se dégradent et libèrent de ce fait progressivement leurs éléments constitutifs. En faisant un bilan des éléments entrant (eau de pluie et d’arrosage) et sortant du système (eau de drainage), les chercheurs ont observé que les Technosols retiennent plus de nitrate qu’ils n’en rejettent. Par contre, ils libèrent plus de carbone dissous dans les eaux de drainage que le terreau.

Des toitures potagères low-tech, simples à conduire, permettent de recycler des déchets organiques et de produire des légumes sans recours à l’utilisation de fertilisants chimiques tout en captant des eaux de pluies. Intégrer des toitures productives constitue une réelle opportunité pour concevoir des villes à haut niveau de service écosystémique même s’il parait nécessaire d’explorer plus avant la nature des sols utilisés.

 

Photo : MAITRE Christophe – Inra
Agriculture urbaine. Potager urbain sur le toit de l’Institut Culinaire Cordon Bleu à Paris dans le 15è arrondissement. La conception de cette toiture végétalisée a été réalisé par l’entreprise Ecovegetal.