Des décors de stucs d’une grande rareté ont été découverts par les archéologues de l’INRAP lors des fouilles de l’antique cité d’Intaranum (Entrains-sur-Nohain dans la Nièvre).

D’origine gauloise, l’agglomération antique d’Intaranum doit sa prospérité au travail du fer durant le Ier siècle. Située au nord du territoire des Eduens (peuple gaulois dont Bibracte était la capitale), elle s’étend sur environ 70 hectares. Au milieu du IIe siècle, un vaste plan d’urbanisme fait disparaître les ateliers de forgerons au profit de quartiers résidentiels. L’espace est découpé en petites parcelles indépendantes. Au IIIe siècle, des gens fortunés acquièrent plusieurs propriétés qu’ils transforment progressivement en vastes et luxueuses demeures.

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Tête d’un personnage aux cheveux blonds qui ornait un caisson du plafond stuqué. © Julien Boislève, Inrap

La salle de bain d’une des demeures était richement ornée. Des milliers de fragments de stucs y ont été retrouvés et prélevés. Travaillé en relief, ce mortier peut être modelé, moulé ou tiré au gabarit pour créer le motif souhaité. Leur étude, actuellement en cours, révèle un plafond peint et stuqué. Ici, le décor, géométrique, est constitué d’octogones bordés d’une bande rouge et de carrés bordés d’une bande bleue. Chaque caisson est orné d’un motif : des feuillages et fleurons aux larges pétales, deux oiseaux et des personnages incomplets. Deux têtes de belle facture et en fort relief sont toutefois intégralement conservées. L’une d’elle, aux traits enfantins et aux cheveux teintés de jaune évoque un petit amour. L’un des personnages tient une sorte de serpe ou de faux. Au centre du plafond, un large médaillon circulaire est également orné. L’importance des reliefs est peu fréquente pour un plafond, ainsi que la richesse et la grande diversité des motifs.

Détail d’une grappe de raisin, au cœur d’un rinceau de vigne. © Julien Boislève, Inrap

Détail d’une grappe de raisin, au cœur d’un rinceau de vigne.
© Julien Boislève, Inrap

Ces vestiges sont exceptionnels et rares. Leur bonne conservation permet de restituer et de comprendre l’organisation du décor. Par ailleurs, si le stuc est le plus souvent une moulure ornant des décors peints, il est ici l’élément central de l’ornementation : il n’est plus secondaire, mais véritablement mis en valeur par les bandes d’encadrement de couleur. En France, seuls une vingtaine de décors à dominante stuquée sont répertoriés, pour la plupart assez mal conservés et issus de fouilles très anciennes. On y compte par ailleurs peu de plafonds, qui plus est avec figurations. Cet ensemble est le plus complet à ce jour découvert en France.

Les milliers de fragments de stucs rejetés en vrac dans une fosse sont minutieusement dégagés pour être prélevés un à un. © Antoine Morfaux, Inrap

Les milliers de fragments de stucs rejetés en vrac dans une fosse sont minutieusement dégagés pour être prélevés un à un.
© Antoine Morfaux, Inrap

Les recherches se déroulent dans le cadre d’aménagements privés, sur prescription de l’État (Drac Bourgogne). Plus de 5000 m2 ont été fouillés. Les lotissements actuels s’implantent sur un quartier résidentiel antique dont l’organisation a peu changé depuis le IVe siècle.

 

Photo en-tête : Le toichographologue assemble les fragments pour recomposer le décor et en identifier la nature. © Philippe Gerbet, Inrap